




La tolérance? C'est un rapport au monde, une présence au monde et une aptitude à gueuler quand le monde a mal. La tolérance? Il suffit d'écouter parler Bernard Lavilliers. Elle habite tous ses mots.
La tolérance? C'est un rapport au monde, une présence au monde et une aptitude à gueuler quand le monde a mal. La tolérance? Il suffit d'écouter parler Bernard Lavilliers. Elle habite tous ses mots. Elle est amour et colère. "J'ai passé toute ma vie à parler de ces questions, dira ce porte-faix de tous mondes. De la musique latine avec des latino-américains, à la musique africaine avec des africains, etc, je dis que la musique, c'est la tolérance. Et il faut faire l'effort de rappeler que la musique est une liberté incroyable".
"Les chansons à la con"
C'est toute la différence avec ce que Bernard Lavilliers appelle "les chansons à la con". Lui est d'ailleurs, dira-t-il d'un air vaguement soucieux, en train de glisser vers "la chanson tragique" : "Je rentre un peu dans le lard. Je ne suis pas dans les lieux communs", ajoutera l'artiste en parlant de "Scorpion", un des titres de son dernier album, "Baron samedi". Les lieux communs? Bernard Lavilliers n'y est jamais tombé. Mais l'artiste se demande quelle récepion aura cet album, et notamment "Scorpion". Car, si, jusqu'ici, nombre de ses chansons dénonçaient la misère et les injustices, elles parlaient aussi de vie, d'amour, de rencontres, de lieux aimés devenus siens. Or, là, l'interpellation est forte. Elle happe et bouscule. Le texte, un poème de Nazim Hikmet (1901-1963), poète turc exilé en Pologne pour avoir rejoint le parti communiste turc, ne ménage pas les consciences : car "S'il y a tant de misère sur terre, c'est grâce à toi mon frère". Mais les inconditionnels du chanteur retrouveront dans cet album, "un voyage musical" né d'un reportage à Haïti et qui porte le nom de l'esprit vaudou de la mort et de la résurrection, Bernard Lavilliers dans toute sa splendeur, dans toute la force de son âme.
Un coeur qui "bat au rythme du monde" et des mots des "Anciens"
L'âme d'un homme qui crie au monde parce qu'il aime le monde, parce qu'il "aime vivre avec les gens". Alors, pour ce qui est de la tolérance, "je suis tellement mélangé, j'ai tellement de cultures en moi qui m'ont nourri, que je m'adapte partout. J'ai une telle faculté d'adaptation que je m'en sers même pour désarçonner l'autre", dira encore Bernard Lavilliers. A l'écouter, on se dit que, finalement, la tolérance est une forme d'humilité et de clairvoyance. Les deux vont de pair qui permettent de se mettre à l'écoute de l'autre et du monde, d'en accueillir la beauté comme d'en dénoncer les violences. "Je prends aussi l'avis des Anciens, confiera d'ailleurs Bernard Lavilliers. Dieu merci, mon père est toujours en vie".